Arnaud Sélignac met en scène une icône incontournable de la littérature américaine, femme de caractère, drôle mais néanmoins alcoolique, Dorothy Parker. Avec efficacité, il redonne vie à ce personnage excentrique, figure marquante des années 50.
Une lumière s'allume doucement. Un fond de musique de jazz débute. Nous découvrons une femme endormie, recroquevillée par terre dans son manteau de fourrure. Des cadavres de bouteilles trainent sous le canapé en velours. Et des feuilles de papiers gribouillés jonchent le sol. Soudain le téléphone sonne ... Voilà comment débute la pièce mis en scène par Arnaud Sélignac dans la petite salle Paradis du théâtre Lucernaire. Dans un espace chaleureux et intimiste, on s'apprête à faire la rencontre d'un personnage : Dorothy Parker. Femme de lettre américaine connue pour son franc-parler et sa plume incisive.
On ne peut pas dire que la première impression soit positive quand la romancière se réveille d'une soirée arrosée croyant -masque de sommeil sur les yeux- être devenu aveugle. Vivant dans une chambre d'hôtel avec comme seul objet personnel sa machine à écrire et une bouteille de whisky. Mais "Dottie" vient de divorcer de son mari le scénariste Alan Campbell et se retrouve à vivre seule à New York. Se rêvant romancière, elle passe ses nuits à taper sur sa machine à écrire au grand désarrois des clients de l'hôtel.
Le décor tout en sobriété est astucieux. La chambre d'hôtel représente la partie principale du plateau. Et c'est l'accessoire majeur du téléphone qui permet de relier le personnage au reste du monde et nous avec. Ce raccrochage permanent à l'objet téléphonique autorise d'autres personnages à entrer et sortir de l'histoire sans pour autant être présent. Il redonne du rythme en cassant le monologue et en faisant intervenir des protagonistes extérieurs qui anime le récit de Dorothy. Ainsi, on fait la rencontre indirect d'Allan, de sa meilleure amie Liliane ou encore de son confident, Charlie, le concierge de l'hôtel. Judicieusement construite ainsi, la pièce évite le piège de la linéarité. Faites de ruptures, de moments de confidences, de souvenirs qui favorise le plaisir du récit. Seule en scène, Natalia Dontcheva rend brillamment hommage à Dorothy. On reconnait en elle, la force et le caractère bien trempée d'une femme politique et engagée. Charismatique, cynique et gracieuse à la fois, elle revêt tous les costumes à la perfection. Insolente mais dotée d'une grande fragilité, elle incarne avec une grande palette d'émotion toutes les nuances de Dottie.
Jean-luc Seigle signe un merveilleux texte plein d'humour et de tendresse qui prend toute sa beauté dans la mise en scène d'Arnaud Sévignac.
Dorothy Parker Théâtre Lucernaire 53 rue Notre Dames des Champs 75006 Paris Métro : De Jean-Luc Seigle Mise en scène de Arnaud Sélignac Avec Natalia Dontcheva Du mardi au samedi à 19h Jusqu'au 19 mars 2016